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Julie Chaffort

Printemps

Vidéo | mov | couleur | 7:40 | France | 2020

Un chant d’oiseaux nous, ouvrant sur une forêt verdoyante un jour de pluie. Une langue de brume s’insinue lentement dans l’image et s’enroule autour des arbres. Des silhouettes humaines la traversent, paisibles malgré les flammes qui lèchent leurs vêtements. Ces âmes errantes fuient-elles quelque catastrophe urbaine ou font-elles partie du bestiaire de créatures merveilleuses peuplant les forêts ? Sont-elles des messagers de l’Apocalypse ou des martyrs, après un geste ultime de protestation ? Le cheval qui les observe sans broncher, tapis dans les fougères, se contente de renforcer l’inquiétante tranquillité de la scène sans donner de réponse. Julie Chaffort connaît bien ce sentiment, pour avoir tourné dans les forêts nombre de ses vidéos, la figure animale y étant quasi omniprésente. Pour l’artiste, le cheval est le « témoin privilégié de quelque chose que l’on arrive plus à percevoir en tant qu’humain ». Un témoin dans une partition tragi-comique nous menant d’un univers « intemporel » et obscur propre aux contes.

Les vidéos de Julie Chaffort mirent le paysage, le toisent et le parcourent ; on y croise des hommes au destin tragique et des héros aussi beaux que les chants qui les accompagnent – peut être pour en donner la mesure. Les gestes accomplis sont tout à la fois drôles et absurdes, l’avenir toujours incertain et les paroles s’envolent, attrapées par les branches d’une forêt ou englouties dans les eaux d’un lac. Les plans fixent les branches ; ils convoquent les tableaux de l’école de Barbizon où les bruns apparaissent comme chargés de bitume et les lumières s’accrochent aux pâtes colorées. Les récits s’écrivent entre les longs plans-séquence et se devinent dans les détails que la lenteur permet d’observer comme l’on admire une nature morte. L’artiste ouvre des univers parallèles, atemporels et insituables, où le monde se signale à nous par ses infimes déplacements et l’infinité de ses signaux – étrangement menaçants. Pour Julie Chaffort, le cinéma est un médium dominant, naturel, qu’elle choisit très tôt de développer, à l’école des Beaux-Arts de Bordeaux où elle étudie, puis auprès de Roy Andersson qu’elle assiste en Suède, et de Werner Herzog dont elle suit le séminaire à sa Rogue Film School à New-York. Elle expose en France et à l’international. Ses œuvres font parties de collections nationales et privées Julie Chaffort est née en 1982. Elle vit à Bordeaux et travaille partout.